Montrer le sommaire Cacher le sommaire
Les mouvements de grève des professionnels de santé, et particulièrement des médecins, ne surgissent pas de manière impromptue. Ils s’inscrivent bien souvent dans un contexte de mécontentements accumulés, d’interrogations non résolues, voire de frustrations persistantes.
Ces revendications peuvent englober des préoccupations financières, des conditions de travail jugées précaires, une reconnaissance professionnelle insuffisante ou encore des réformes jugées inadéquates.
Chaque mouvement revendicatif, loin de n’être qu’une simple cessation de travail, est le reflet d’une profonde aspiration à l’amélioration d’un système et d’une prise en charge patient plus efficace. Il convient donc d’approcher ces actions avec une écoute attentive et une volonté de comprendre les motifs sous-jacents.
Stratégie concertée pour une grève des médecins libéraux
En préparation de la grève sans précédent du 13 octobre, initiée au coeur de l’été par quatre syndicats emblématiques de médecins libéraux – le SML, l’UFML-S, la FMF, ainsi que l’Avenir-spé-Le-Bloc -, une stratégie minutieuse se trame en arrière-plan.
À voir Arrêtez de décorer votre réfrigérateur, voici pourquoi c’est une mauvaise idée
Sous la gouverne avisée du Dr Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux, un projet ambitieux se dessine : organiser le départ temporaire des médecins vers des contrées étrangères.
« Nous ne souhaitons guère assister, passivement, à une réquisition systématique de nos confrères », affirme la chirurgienne avec conviction. L’ambition est claire : ces médecins doivent demeurer injoignables.
À l’heure actuelle, un séjour académique est orchestré du 13 au 20 octobre à Oxford, prestigieuse cité britannique. « Notre communication interne sera axée sur l’identification des médecins désireux de participer », souligne la docteure.
Elle évoque même la possibilité d’élargir cette escapade « linguistique » à des praticiens non affiliés.
Un objectif pédagogique
Au-delà de ce mouvement symbolique, une aspiration profonde émerge : la formation des médecins à l’anglais médical. « Il s’agit d’outiller adéquatement ceux souhaitant embrasser une carrière à l’étranger », précise le Dr Sophie Bauer.
À voir Voici comment ChatGPT a sauvé la vie médicale d’un enfant en détresse
La chirurgienne relève une tendance croissante : la quête d’acquisition de compétences en anglais médical parmi ses pairs. « Pour nombre d’entre eux, le ressenti est à saturation », confie-t-elle.
En témoignage de cette désillusion, elle évoque le flux grandissant de médecins se dirigeant vers des pays tels que la Suisse, le Royaume-Uni, les États-Unis ou le Canada. « Nous assistons à une saignée préoccupante », alerte la spécialiste.
Selon les données émanant de l’OCDE, l’année 2021 a vu approximativement 4 800 médecins français exercer hors de nos frontières, contre 3 600 seulement en 2015.
Une dimension humanitaire
Pour concrétiser ces départs, le SML envisage de puiser dans ses fonds de formation. « Nous évaluons actuellement le nombre de participants potentiels », confie la présidente.
Outre ce voyage en terre anglaise, une expédition humanitaire extra-européenne est à l’étude durant cette même période. Le double enjeu ? Maintenir ces médecins hors du champ de réquisition, tout en offrant leurs compétences là où « la gratitude du patient prime », note la chirurgienne.
À ce stade, aucune concertation intersyndicale n’est arrêtée pour cette grève imminente. Toutefois, ces départs pourraient s’inscrire dans une dynamique plus large, en collaboration avec d’autres syndicats, selon les dires de la présidente du SML. Une rencontre est par ailleurs prévue avec le ministre de la Santé le 11 septembre prochain.
D’une pertinence singulière, cette décision de grève révèle une évolution préoccupante de la condition médicale en France. Avec l’augmentation constante des charges et des responsabilités, conjuguée à une reconnaissance souvent mitigée, nombreux sont les praticiens qui s’interrogent sur leur avenir au sein de l’Hexagone.
Cette émigration temporaire, bien que symbolique, résonne comme un avertissement solennel adressé aux autorités. Si le malaise n’est pas pris en compte, pourrait-on assister à une délocalisation pérenne des talents médicaux français ? Une telle hypothèse, autrefois inconcevable, semble aujourd’hui prendre des contours de plus en plus tangibles.